La crise sur le gâteau

Alors oui, il faut bien admettre l'inadmissible et révéler la triste réalité aux yeux du monde entier que tu représentes, lecteur universel : j'ai eu 40 ans ! (Je les ai même un peu dépassé maintenant...)

Bon, en soit, c'est pas bien grave me diras-tu et tu auras raison car ça arrive à des tas de gens bien. Mais qui dit 40 ans dit crise (bah si, la crise de la quarantaine, ça ne te parle pas ?) et force est de constater un an et des patates après avoir soufflé mes 40 bougies que la crise, j'y ai eu le droit !

Mais alors quoi ? te demandes-tu, lecteur curieux et impatient (et un peu commère aussi (avoue-le)) Elle a pris un amant ? Elle a planté Pappouth et les mioches pour aller se dorer la pilule à Ibiza en buvant des cocktails rose fluo servis par des jeunes gens très musclé et beaucoup trop bronzé ? Elle a pris un amant ? Elle a repeint le salon en noir corbeau et posé des fauteuils argenté sur lesquels les enfants n'ont plus jamais le droit de s'assoir (parce que c'est salissant, un enfant) ? Elle a pris un amant ? Elle a fait une lipo, s'est fait retendre la peau du cou (et celle du cul), elle a subit une opération qui a quadruplé son volume mammaire (avec ma base de départ, faut au moins quadrupler...) ? Elle a pris un amant ? Elle a tout plaqué professionnellement pour aller élever des lamas et des émeus dans les hauts plateaux du Larzac ? Elle a pris un amant ? Elle a pris un amant ? Elle a pris un amant ????

Non, non, non, rien de tout cela ! 

Ma crise de la quarantaine est beaucoup plus subtile, plus lente, passe plus inaperçue (et donc, beaucoup plus classe aussi, faut bien le dire !)

Bon déjà, pour replacer le contexte (et faire durer le suspens (parce que tu aimes ça, le suspens, avoue)) mes 40 ans sont arrivés 2 mois après la naissance de Krystian, donc en fait, ils sont passés comme une lettre à la poste. Je n'ai pas connu les angoisses pré-anniversaire et je n'ai pas guetté l'affaissement de la peau de mes bras dans la glace. À 40 ans, je n'étais pas une quarantenaire, j'étais une jeune maman et ça, ça change tout. 

Alors bon, naïvement, j'ai pensé que j'étais passée à travers la crise. Et comme en plus, je n'ai pas subi de chirurgie esthétique, pris d'amant ou cramé le chat dans des rites sataniques, bah, j'ai vraiment pas vu venir le truc. Et pourtant... 

Me voilà à 41 ans et 2 mois en train de regarder mon très récent passé et de constater que oui, il y a bel et bien eu changement. Allez, j'arrête de te torturer en te laissant dans cette attente sans fin, douloureuse et frustrante et je te le dis :

Je suis devenue complètement écolo ! 

Et oui, tu as bien lu (et tu dois sûrement chercher ton souffle à l'heure qu'il est pour te remettre de cette tempête émotionnelle que tu viens de subir) et oui, j'assume : je suis écolo ! 

Mais attention, je te parle de la vraie écolo, pas la petite joueuse que j'étais avant mes 40 ans qui râle quand on laisse le frigo ouvert trop longtemps et qui éteint l'eau quand elle se brosse les dents. Non, non, aujourd'hui je suis la vraie écolo, emplie de conscience écolo jusqu'au bout des cheveux et j'ai adapté mes habitudes de vie (et celle de ma famille par la même occasion) à cette révolution. 

Alors oui, mais quoi ? te diras-tu à nouveau (à moins que je ne t'ai perdu (tu as peut-être déjà changé de page internet en pestant que ça aurait été beaucoup plus croustillant si j'avais pris un amant comme tout le monde)) Et bien je vais te faire une petite liste non exhaustive de mes changements depuis un peu plus d'un an :

- Exit tous les shampoings et gels douche qui génèrent non seulement des bouteilles plastiques non recyclables, mais qui en plus polluent l'eau qui part dans mes tuyaux (enfin, ceux de ma salle de bain (et donc de ma ville (et donc de la mer))) Tout a été remplacé uniquement par du savon de Marseille (attention, seules quatre usines font du véritable savon de Marseille (le reste s'appelle savon de Marseille, mais n'en est pas)) (Et je me questionne même sur le no-poo qui consiste à ne plus rien utiliser d'autre que de l'eau pour se décrasser des pieds à la tête) Pappouth, les garçons et moi n'avons pas de problème de sécheresse de peau ou autre depuis ce changement.

- Fini (au max (parce que pour l'instant j'y vais encore un peu) les supermarchés, j'achète en vrac (avec mes petits bocaux dans mon cabas à roulette (oui, Madame)) Et quand j'achète quand même à la superette du coin, je ne prends que de l'emballage carton, qui se recycle. 

- Je fais tout maison : les desserts, les yaourts, les compotes... plus un seul pot de plastique n'a franchi la porte de mon frigo depuis des lustres. Je viens de pousser le bouchon jusqu'à faire mon eau gazeuse, pour ne plus acheter d'eau en bouteille (plate, je bois celle du robinet).

- Je fais aussi mon dentifrice, mon déo et ma lessive. Je n'utilise plus de coton-tige, ni de coton à démaquiller et les lingettes pour les fesses de Krystian ont été remplacées par des carrés lavables. 

- Je tente de ne rien acheter neuf : vêtements (que je récupère dans la rue ou que je prends à la Croix Rouge pour des sommes modiques), mais aussi appareils ménagers (ma yaourtière, ma sodastream sont de la récup' de copains qui ne s'en servaient pas (merci les copains !!!)

- Je boycotte Amazon et généralement je ne commande plus rien par internet pour ne pas générer de déchets et de pollution de transport.

Bon, j'en oublie certainement et je n'ai peut-être pas noté ceux qui me paraissent le plus évident (je cuisine des produits locaux et de saison en passant par une AMAP, mes 2 enfants ont fait caca dans des couches lavables) Bref, je consomme nettement moins (en tout cas de choses superficielles (ah oui, parce que je suis devenue minimaliste aussi (personnellement, je trouve que ça va assez bien avec)), mais ma bouffe est de meilleure qualité, je contrôle un minima ce qui entre dans le corps de mes enfants et aujourd'hui, quand je traîne Kevina dans un magasin, qu'il me demande s'il peut avoir tels ou tels gâteaux ou bonbecs ou chocolat, que je lui dis non et que je l'entends me rétorquer "ah oui, c'est plein de cochonneries, ça !", bah je me dis que ma quête n'est pas complètement vaine !

Alors ça peut paraître un peu farfelu comme crise de la quarantaine, un peu léger et même limite ridicule par moment, mais depuis que j'ai 40 ans, je me sens de plus en plus en accord avec moi-même, avec ce que je souhaite pour mes enfants. 

Bien sûr, je vis encore avec des contradictions terribles (j'ai décidé de rester un être humain quand même) : j'ai un smartphone (mais je me renseigne sur comment l'utiliser au mieux pour le garder 6 ans au lieu d'1), je me gave de bonbecs dégueulasses (par leur composition, parce que leur goût hummmm) dès que je suis chez des copains car je n'en achète jamais moi même, je prends des bains (aaaaargh le truc anti-écolo dont je n'arrive pas à me passer de temps en temps en hiver), et pour l'instant je refuse catégoriquement de revenir aux mouchoirs en tissu ! 

C'est certainement déjà trop tard, notre bonne vieille planète en a déjà trop pris plein la tronche et objectivement, vu les perspectives d'avenir, il faudrait arrêter de faire des enfants, vu le monde super pourri qu'on leur lègue. Mais voilà, mes enfants sont là et je me suis quand même attachée à eux, alors je me dis que puisque je les ai collé dans cette galère, c'est la moindre des choses que j'essaie d'apporter ma petite goutte de mieux à l'océan. Et puis, naïvement aussi, je me dis qu'en élevant les enfants dans cette pleine conscience de ce qu'on peut/doit faire pour la planète, y'a peut-être une chance que ça s'améliore un jour. Parce que oui, j'avoue ça aussi, je fais partie de ces hurluberlus qui pensent que les enfants sont l'avenir du monde. 

Allez, je te laisse avant de devenir moralisante ou cucul la praline, je m'en vais traire une chèvre pour faire mes fromages et promis, pour ma crise de la cinquantaine, j'essaie d'être plus rigolote en prenant un amant !!!